Cafard, mais ni hémi, ni coléo, ni dipt, ni hyméno ou lépido (-ptères), pour autant.
Ce matin, en me levant, je n’ai pas retrouvé mon moral. Envolée ma bonne humeur habituelle. Si on était le soir, je pourrais invoqué le syndrome du dimanche. Mais nous ne sommes que le matin, et, en plus, désormais, tous les jours ressemblent au dimanche. Ça doit venir « d’aut’chose ». Pas grave. J’ai le remède miracle contre le moral à Berne, pardon en berne. Il est très simple. Vous choisissez un album de musique entrainante, qu’un chanteur généralement mort à commis par erreur, genre « les sardines » de Patrick Sébastien, vous l’écoutez en mettant le volume à fond et vous chantez dessus, très fort et très faux. En ce qui me concerne, la deuxième option est particulièrement simple, parce que naturelle. Normalement après deux ou trois daubes remixées à votre sauce, votre cerveau est complètement shooté et votre sourire, revenu, comme par magie.
Malgré le succès pourtant reconnu de cette méthode, aujourd’hui, j’en essaie une autre. Le silence. C’est complètement anormal dans mon chalet. Y a toujours une source sonore qui s’élève quelque part, dans pièce ou une autre.
Punaise, le silence, en fait, c’est envahissant !
Ça s’infiltre partout, ça remplit tout, c’est peut-être même contagieux ?
Après dix minutes d’immobilité, (certains appellent ça de la méditation) je suis apaisé, régénéré. En écho à ce mutisme (je ne sais pas si un mutisme peut faire écho), les chats, eux, se sont endormis. Sur place. Ketchup, perchée, sur le dossier du canapé, comme à son habitude, et Moutarde, les pattes en l’air, au beau milieu de la pièce. En fait, le silence, c’est une arme de destruction massive. Une sorte de « Taser » qui ne veut pas dire son nom.
Du coup, mon moral reparti à la hausse, comme les bourses (ah non, pas comme les bourses) je décide, à l’instar de notre courageux Conseil Fédéral, de redonner un tour de vis aux mesures déjà prises. Après l’obligatoire « lavage-rasage-habillage » matinal, après l’heure de lecture forcée, je décide d’imposer le quart d’heure de gymnastique « abdo-dorso-nuquo jambal ». En résumé, je déroule mon tapis de sol et je m’ébroue dessus, histoire de voir là où mon corps me fait le moins mal. Ketchup s’en fout, mais Moutarde adore l’idée. Elle veut participer à tous les exercices, au péril de sa jeune existence. Elle nargue un potentiel écrasement d’une dérobade rapide et souple, repousse d’un coup de patte doux mais ferme, ce pied trop envahissant, fronce ses sourcils face au fumet de cette haleine matinale encore non « Elmexée ». Ce n’est plus de la gym, c’est du « yoga-chat », variante « pousse-toi de là que je m’y mette ». Ça ressemble à rien, mais, ça aussi, ça me fait du bien.
Toujours sous l’emprise des endorphines produites par « les sardines », je décide d’enchainer avec l’impérieuse heure de lecture. L’idée du balcon reste acquise, mais depuis hier, le printemps « tout court » s’est mué en printemps suisse. Le ciel est désormais d’un gris pisseux, l’air très frais et la bise (déjà levée), pénétrante. J’opte pour la méthode « fumeurs de l’impossible », chaussettes chaudes, doudounes épaisse et bonnet enfoncé jusqu’aux lobes des oreilles. Trois chapitres supplémentaires de « l’Abominable » passent de ma liseuse vers un lobe perdu, quelque part au fond de mon cerveau. J’ai un peu froid, mais je me sens, une fois encore, bien.
Demain est un autre jour. Comme tous les jours, en principe. Oui, mais demain je retourne au travail. Enfin, au bureau. Enfin…. à la table d’à côté.
PS. Il existe une autre mesure de contrainte, non explicite, mais que vous avez désormais la chance (ou pas) de lire chaque jour de confinement qui passe, c’est l’écriture de cette chronique. Et ça non plus, ça n’a pas de prix. En tout cas pour celui qui l’écrit.