Vendredi 22 juin : Kiko me natellise pour un rdz-vs le dimanche 24 juin. But: 1er vol de la saison, avec le début de nos vacances! 1er vol, seulement : because printemps pourri, en particulier les week-ends! 1er vol, donc site connu : Val de Bagnes. Chargement des ailes et grimpette motorisée en 4×4, jusque sur la route des Ruinettes, au-dessus de Verbier. Lieu-dit: Fontanets,alt.2240 m. Pique-nique, relaxation et montage des ailes parmi les parfums typiques de la flore des alpages : herbe fraîche, orchis vanillés, gentianes et violettes… Chaque année, ces senteurs réveillent nos mémoires icariennes de la saison précédente.
Le zéph est soutenu, quoique un peu latéral. D’étranges sensations, une impatience naissante, encore maîtrisée, et un léger picotement de plaisir nous titillent le creux de l’estomac.(peut-etre est-ce autre chose pour Kiko qui a de la peine à émerger et qui a encore la tête dans le c…, comme il dit : lendemain d’hier!!!)
3 autres vélideltistes, des copains habitués du site, décollent déjà. Derniers checks sérieux, (1er vol!!!), Kiko inaugure son nouveau cocon, donc derniers réglages. Je me prépare. Les deltistes se trouvent déjà à 3000 m. Attente d’un cycle de thermique pour un bon zéph de face. J’aimerais que mon vol dure un petit peu plus longtemps! L’attente paraît interminable, mais l’impatience et la tension ne doivent pas me faire oublier ma V.I.E! Décollage assuré, je pique directement sur la traditionnelle pompe « à couillons ». Je sens le thermique juste quelques secondes avant mon alti-vario.
Ah! le feeling des années-vol sans instruments! Il est soft; le temps de quelques va-et-vient pour prendre mes repères, j’enroule en douceur. Je centre l’ascendance et mon Brazil se met sur les rails : 2m-3m-4m/S. Kiko se prépare au décollage: de nouveau, vent latéral! Le vent de vallée est plus fort. Attente d’un nouveau cycle. Après 10 minutes d’ascenseur, je me trouve à 3000m et je vise le Mont-Gelé : alt. 2921 m. Une autre ascendance m’accompagne et me propulse à 3200 m. Les couches neigeuses et les névés encore nombreux cette année en altitude créent les conditions d’un vol de printemps. A cette altitude, j’enroule dans du 5+. Il y a 15 minutes que j’ai quitté le plancher des vaches et Kiko, qui vient de décoller, peine à touver la pompe! Entre 2 cycles! Après quelques aller-retour, Mont-Gelé-pompe, je me retrouve, à l’attendre à 3200 m. J’opte pur une transition vers le Mont-Fort, alt. 3300 m. en m’appuyant sur les crêtes des Monts de Sion. Les pompes se succèdent et je fais le plein à chaque station. Le ciel est occupé tout autour par 7-8 deltas. Je me place maintenant sous une rue de nuages dont la base doit se trouver à 3500 m. et c’est le boulevard. Kiko arrive à ma hauteur et je poursuis. Je me sens aspiré et le bip de mon alti-vario s’affole: 5,5 m-6 m/s. Les deltas jouent à cache-cache dans les barbules… Très peu pour moi : because 1er vol et déjà une euphorie suffisante pour jouir de ce vol extra. Je quitte le nuage côté « soleil », donc évidemmnent, ça monte encore! Super! Extraordinaire! Inénarrable! Je me balade easy à 3400 m. Du coup, je saute vers le Bec-des-Rosses qui m’avait donné des crampes aux bras l’année passée. Crampes et fatigue inutiles, car je n’ai jamais « fait » le sommet. Là, je m’éclate 100 m au-dessus et j’admire les couloirs abrupts où les meilleurs freeriders du monde se tiraient la « bourre », il y a 2 mois et demi! L’enneigement est encore impressionnant. La face sud, par contre, très exposée, canalise les thermiques naissant au fond de la vallée et après 3 tours avec l’impression d’un soaring amusant, je me retrouve de nouveau à 3400 m. Kiko a atteint le Mont-Gelé et grimpe dans sa pompe, beaucoup plus au nord. J’ai envie de bouger, aujourd’hui: donc cap sur le Mont-Fort, chapeauté par un beau nuage. 3400-3450-3500-3520 m, le sommet se trouve 200m plus bas et la station des Gentianes est encore complètement immaculée. Kiko arrive. Un autre delta apparaît et disparaît dans le nuage. Vent O/NO. C’est la journée idéale pour un vol-distance en direction du Valais central. malheureusement, nous avons les radios à plat. P-A a oublié de les mettre en charge pendant la mauvaise saison!donc, option transition vers l’autre versant. Une immense autoroute au-dessus de la vallée à une altitude de 3500 m. Je tire l’étarqueur et c’est parti, mais pas la barre au ventre. Je profite de décontracter les bras et les épaules soumis à des tensions pendant cette première partie de vol musclé.Le manque d’entrainement se fait sentir: il y a 40 minutes que je vole. Le survol de la vallée à cette altitude offre un panorama grandiose du Cervin, au lac de Mauvoisin et coup d’oeil jusqu’au Mont-Blanc. Le « vert » de la vallée contraste merveilleusement avec la blancheur des sommets m’entourant et la vue de mon « coin de terre » m’est peu commune sous cet angle. Magnifique! Irréel! J’ai hâte d’atteindre l’autre versant pour m’appuyer sur des thermiques prometteurs. En effet, le Mont-Rogneux est ombré par d’autres nuages. La situation évolue vite et j’atteins les contreforts du Rogneux, au-desssus des lacs de Servay, à une altitude de 2800 m. Mais la suite s’annonce plus aléatoire. Dans la traversée, j’ai repéré un « Laminar » qui m’ouvre la route. Seulement, il a 400 m d’avance sur moi et atteins le col de Mille sous une embellie de soleil. Il enroule et monte immédiatement. Je me bats dans les couloirs nord-ouest, très proche de la pente, profitant de tous les « dynamiques » qui peuvent lécher le relief. Rien!!! Maintenant, toutes les pentes sont dans l’ombre des nuages de plus en plus nombreux.
Je pilote calmement et finement pour garder de la hauteur. Aucun thermique dans les couloirs malgré l’ensoleillement plus bas dans les mayens. Je persiste et j’opte pour un passage du col de Mille avec un peu d’appréhension: rotor ou pas? Je me trouve à 50 m du sol, mais l’air me paraît calme. Aucune bulle. Je perds encore de l’altitude et prends un peu de marge en obliquant à droite pour avoir plus de dégagement sous mes pieds. Là, où le Laminar a pris l’ascenseur, un névé! J’arrive sur l’arête, franchis la ligne un peu tendu. Rien! Je prends un peti 0 m/s nettement insuffisant pour envoyer un 36o: because la marge sous mes pieds est insuffisante, mais l’espoir renaît. Je longe l’arête espérant du dynamique. De l’autre côté ombré par les nuages de plus en plus nombreux, rien non plus. Les pentes herbeuses et douces ne me rassurent pas pour un atterrissage en contrepente, ni dans la vallée d’Orsières. Donc, demi-tour. Je ne vois plus Kiko: resté au-dessus du Bec? Au-dessus de moi, sur le Mont-Rogneux, le Laminar! Plus haut, dans le nuage, un autre delta, presque au Petit-Combin. Je rage. Option: retour sur l’épaule nord pour rechercher une pompe qui « doit » se déclencher. Je descends: 2500 m. Elle doit être là, devant moi, mais toujours pas de soleil! J’aperçois Kiko qui arrive avec une belle perte d’altitude dans la transition. l reste sur la face nord et cherche dans les pentes enneigées. J’arrive sur le lac de Servay inférieur, sur une arête minuscule. Je sens un frémissement. Mon alti m’indique un petit 0m5/s . Se maintenir! Je détends l’étarqueur et me prépare à enrouler, moi-même un peu plus tendu: j’envoie mon 360 assez proche du relief Je monte sur les 2/3 du cercle, mais c’est difficile à centrer. J’insiste pour tenir jusqu’au prochain cycle. Le soleil réapparaît, l’ombre se déplace. Enfin, du 1m/s! Je survole l’arête, mais la zone est minuscule. Il y a 1h15 que je vole: je suis à 2o m des rochers . Le soleil revient et la bulle gonfle, je remonte à 2700 m. La zone vers le col est ensoleillée. Rebelote: je traverse les couloirs en emmagasinant quelques mètres à chaque petite bulle et je franchis le col avec un peu plus de marge. Je profite du « dynamique » pour grimper encore et chercher la pompe dans la face sud-ouest du Rogneux.Elle est là et me catapulte tout de suite après quelques tours à 2900/3ooo m entre deux nuages plafonnant 600m plus haut. Je respire, savoure et observe: Kiko sur le col dans le soleil. Et… extraordinaire, juste en dessous dans les contreforts rocheux, un aiglon joue dans les ascendances: juste une petite leçon pour moi! Je le suis des yeux en essayant de me maintenir à la verticale. La pompe est là et je prends 200 m. Du 5 m/s! Je le perds des yeux un instant, car j’approche des barbules. Oû sont les autres deltas? Soudain, un sifflement caractéristique un peu au-dessus de moi. Un planeur! Non, 2-3-4 , à la queue leu leu ! Eux peuvent voler dans les nuages et ne se privent pas: ils enchaînent vers le Petit Combin. Je dégage et manifeste ma présence. L’ascenseur m’envoie au-dessus du Rogneux et je me maintiens dans le ciel dégagé. Kiko arrive et choisis le côté nord enneigé. Plus bas, il pousse en direction du Petit Combin. Tout à coup, les planeurs désertent la zone à 100 Km/h. Là, les nuages me sucent et me propulsent à 3500 m. Le Mont Rogneux se fait tout petit en dessous. Cela fait 1 heure 30 que je m’icarise et la fatigue se fait sentir. 2 deltas se promènent encore dans les nuages et j’approche du Petit Combin par l’arête. Soudain, l’ascenseur se fait plus insistant et je décide de dégager vers le ciel bleu. Fatigue, appréhension, tensions, je sors à 3600 m au dessus de l’arête en direction de Sembrancher et décide de me détendre par un vol-plaisance vers le Six-Blanc et le Catogne. Je profite d’un point de vue original vers Champex, Vichères-Bavon et les Chutes du bisse.Un petit détour sur les mayens de Bruson , puis de Sarreyer pour un retour vers l’atterro. Vol de pente calme et balade sur Lourtier. La fatigue s’accentue, ma nuque est douloureuse, mes muscles sont tétanisés. L’approche sur ce terrain parfois délicat est impeccable, mais avec trop de hauteur. Le terrain est encombré par les bottes de foin, les machines agricoles et une dizaine de deltas. J’opte pour un atterro en arrière du terrain. Quelques S pour détruire, je m’aligne et la zéph change. Les yeux sur la manche, je corrige, mais sous-vitesse et peu de vent dans le creux:contact un peu violent avec la terre ferme. Erreur de débutant!Je suis sonné par un joli coup derrière la tête. Je reprends mes esprits: Pierre-Alain, un copain vient vers moi et soulève mon aile: les 2 montants feront de très jolis tuteurs pour les plantes à Françoise! Je m’en fiche: c’est le 1er vol, mais aussi le plus extraordinaire réalisé en 10 ans dans cette vallée. Kiko a survolé le Petit Combin et atterri impeccablement, mais vermoulu. Je mettais en cause ma condition physique, mais même un prof de sport… Merci Kiko pour ce vol. Bilan : 2 heures de vol extraordinaire, une envie de vous communiquer cette balade fabuleuse et de susciter le plaisir de découvrir cette vallée. Rendez-vous à l’atterro à Champsec ou au décollage aux Ruinettes.
P.S.:Ma doctoresse aura besoin de plusieurs séances pour replacer mes vertèbres, alors que le lendemain, grâce à Pierre Hubert, mec super cool, passionné et très serviable, mon delta revivait.