Les touristes asiatiques repartis dans leur lointain orient, le temps de regarnir un compte en banque mis à mal par d’onéreuses vacances en Helvétie. Les randonneurs locaux découragés par l’absence de remontées mécaniques habituellement chargées de les hisser jusqu’à l’épaulement le plus spectaculaire du Valais. L’occasion était belle de retourner « rider » l’enchevêtrement de sentiers mythiques de l’Aletsch Arena, dont le bike est habituellement banni, en démarrant du lac de Märleja pour finir à la Riederfurka et sa célèbre Villa Cassel.
Aucun marcheur « râleur » pour nous faire remarquer que les chemins leurs sont normalement réservés, mais plus de neige et de verglas que prévu, en particulier le long du versant nord du toujours ombrageux Eggishorn. En même temps, pour un dernier jour d’octobre et après le passage particulièrement rafraîchissant de la tempête « Gonzalo », c’était peu probable de rouler, crampons au sec, sur cet ubac morainique et glaciaire.
Halloween In Aletsch !
Une petite gourmandise de fin de saison, improbable et au goût délicieusement épicé d’interdit. Par tous les Saints (de demain), c’était trop bon !
Du soleil, de la douceur, mais aussi de la boue grasse et collante ...
... et des panoramas d'exception, pour la partie ascendante de notre itinéraire.
C'est en le longeant qu'on découvre combien le méconnu Fieschertal est profond.
Besoin pressant ou juste une vie d'abandonner la piste un instant ?
La brève traversée de l'Obers Tälli vient nous rappeler que nous sommes aux portes de novembre.
Et à propos de porte, celle du tunnel de Märjela est, heureusement pour nous, encore ouverte.
Une dizaine de mètres de lumière blafarde suivie d'un gros kilomètre d'obscurité totale et de flaques d'eau glaciale : l'aventure dans l'aventure.
Passer des ténèbres humides à l'éclatante lumière de ce nouveau jour béni, par l'étroite porte d'hiver, demande quelques contorsions qu'on est forcément heureux de s'infliger après une telle traversée.
On rentre dans le Märjela comme on entrerait au Tibet par un haut col himalayen : les yeux écarquillés et le souffle coupé.
Le souffle coupé, mais pas au point de ne pas effectuer un rapide test de solidité de la glace du premier lac naturel de ce somptueux vallon.
Par contre, pour en faire de même sur son lac artificiel, il faudra encore attendre un peu.
Que sont quelques marches à franchir ...
... quelques hectolitres de boue gluantes à avaler...
... quelques cairns à contourner ...
... et quelques rochers glissants à défier ...
... quand il s'agit d'accéder au paradis ? Rien d'autre qu'un passage obligé.
Autre passage obligé, la remontée du chemin jusqu'à l'arête nord de l'Eggishorn.
Quand je vous dis que ça ressemble au Tibet. Même la (non) présence de sherpas en atteste.
La semaine prochaine, vélo ou ski, peu importe, j'emmène mes peaux.
Pieds trempés et genoux écorchés, on finit quand même par émerger au soleil...
... pour, aussitôt, remonter en selle...
... et filer sur notre chemin de digue, version fleuve gelé et revêtement mal pavé.
Je crois qu'il est grand temps d'envisager de dépoussiérer les Mov'.
En attendant, je suis content que notre départ matinal m'ait empêché de refaire la pression de mes pneus.
Glacés ou pas, en Valais, tous les fleuves font des coudes.
Et si Dynafit se mettait à faire des vélos ? A quoi ressembleraient-ils ?
Quand le grand glaçon et le chemin plongent de concert, c'est qu'il urgent de rattraper nos meilleurs alliés britons, pas vraiment dépaysés par les conditions.
En quittant le versant pour la moraine, le chemin repasse de l'hiver à l'automne.
Et localement, à un automne en pente très douce.
On est parfois bien peu de chose !
La trouée de Bettmergrat se profile à l'horizon, nous dévoilant la vue sur les géants des Valaisannes.
Quelle journée de m.... Le ciel est à nouveau plein de nuages.
Entre la boue collante et le verglas traître, mon coeur blalance ... et mon pilotage, en permanence, doit s'adapter.
Ah, enfin de bons vieux cailloux désordonnés, mais secs. Le retour aux fondamentaux a souvent du bon.
De l'ombre, de la pente, des dalles acérées et l'idée de ne jamais renoncer.
Le Bettmergrat jette dans la bataille ses derniers pièges pour tenter de nous faire mettre pied à terre.
En vain. C'est en selle et contre tout que nous finissons par accéder à son épaulement réputé dans le monde entier.
En abandonnant l'ubac pour sa crête ensoleillé, nous retrouvons notre menu préféré : la poussière et les cailloux.
Il ne reste désormais plus qu'à se laisser doucement glisser jusqu'à la Villa Cassel.
Enfin, glisser, glisser, il faut aussi pas mal pédaler et "grailler" pour venir à bout des innombrables faux plats remontants qui nous en séaprent.
Le bonheur est, aujourd'hui, sur la moraine ...
... et sur son sympathique enchevêtrement de racines.
Et si on allait voir du côté de la passerelle sur la Massa ?
Trois traverses, deux lacets ...
... pour 30 minutes d'une harassante remontée en portage, histoire de franchir à nouveau la Riederfurka...
... retrouver Riederalp et sourire.
Avec la semi-PPD de Ried-Mörel, on est de retour en terre connue, même si elle n'est pas forcément très appréciée.
Les voies de Bitsch sont parfois impénétrables, mais, ici au moins, on pourra toujours dire qu'on ne comprend pas la langue.
La ville de Brigue est aussi réputée pour sa gare ferroviaire que pour ses voies express et poussiéreuses.